© I.B. Tauris, 2015
Présence de l'absence : photographier la perte et la violence
The Armenian Mirror-Spectator, 24.09.2015
NEW HAVEN, Connecticut - Armen T. Marsoobian, directeur du département de philosophie à la Southern Connecticut State University et auteur de Fragments of a Lost Homeland - Remembering Armenia (I.B. Tauris, 2015), était l'invité d'un dîner-débat organisé par l'Institut d'Etudes arméniennes de l'University of Southern California (USC). Cette manifestation s'est tenue le 16 septembre au Ground Zero Coffeehouse de l'USC. Marsoobian s'est entretenu avec Varun Soni, doyen d'Etudes religieuses à l'USC.
Le Center for Advanced Genocide Studies [Centre d'Etudes avancées sur le génocide] de la Fondation de la Shoah à l'USC co-parrainait l'évènement.
Petit-fils de survivants du génocide, Marsoobian a consacré ces dernières années à présenter des expositions en Turquie d'archives photographiques rassemblées par sa famille, qui étaient tous photographes et furent ainsi épargnés par les gouverneurs ottomans, lesquels en avaient besoin. Alors que la plupart des foyers arméniens ne possède pas la moindre image de leurs familles, Marsoobian en a des centaines.
"Ces photographies témoignent en quelque sorte des identités des Arméniens à l'époque la plus dure du génocide arménien. Elles documentent une existence et une culture qui ont été effacées et sur lesquelles la nouvelle génération en Turquie sait peu de choses," relève Marsoobian.
Dès que Marsoobian a entamé le processus d'archiver et d'exposer ce qui lui fut légué par sa famille de photographes, le périple universitaire se fit personnel et émotionnel. Il évoqua ses voyages en Anatolie et l'importance d'arpenter le territoire et de voir les lieux exacts qui présidèrent à la naissance de la culture arménienne.
L'histoire familiale de Marsoobian est faite de prospérité, de culture vivante et de perte soudaine. Lors de cet entretien, il relata une discussion entre ses grands-parents durant l'été 1915. Après avoir perdu la protection de la police, la famille fut obligée de choisir entre rejoindre les marches de mort avec le reste des exilés ou de se convertir et de vivre en tant qu'Arméniens islamisés. Ils choisirent cette dernière option, changèrent de noms et devinrent des Arméniens cachés.
"A mesure que passent les générations qui ont pu survivre en se convertissant de gré ou de force, elles partagent leurs secrets avec leurs familles. Tout d'un coup, des dizaines de milliers de citoyens de Turquie découvrent leurs racines arméniennes. Et ce dans un pays où être Arménien est l'objet d'insultes. Nous abordons une période très intéressante et difficile dans les relations arméno-turques, et le trésor familial d'Armen Marsoobian aide chacun à mieux comprendre le passé et peut-être l'avenir," précise Salpi Ghazarian, directrice de l'Institut d'Etudes arméniennes à l'USC.
Marsoobian continuera de présenter ses expositions en Turquie et à travers le monde. Il est convaincu que le fait de partager ce genre de photos est important pour la petite communauté arménienne subsistant à Istanbul et le reste des Arméniens - qu'ils soient redécouverts ou encore cachés.
La vidéo intégrale du débat est consultable sur
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Source : http://www.mirrorspectator.com/2015/09/24/presence-of-absence-photographing-loss-and-violence/
Traduction : © Georges Festa - 10.2015